par Rémi Chaussenot
le 04 décembre 2018

Avant de commencer cet article, j'aimerai revenir sur les évènements qui se sont passés sur ce blog ces dernières semaines. Suite à mon dernier article "NeurOptimal avoue enfin ne pas être du Neurofeedback", de nombreux praticiens NeurOptimal sont venus m'insulter et ont tenté de me discréditer dans les commentaires, un peu partout sur mon site. Vous connaissez l'importance que je porte à la transparence des informations, c'est pourquoi aucun de ces commentaires n'a été supprimés. Vous pouvez aller les lire, et voir ce qu'il en est, libre ensuite à vous de vous faire un avis. Entre la personne qui vend des formations NeurOptimal et se fait passer pour un client content, celle qui recopie les témoignages du site de NeurOptimal et vous renvoie vers leur rubrique "Recherche" que j'ai débunké dans cet article, ou un représentant France qui tente de me manipuler et part quand je lui demande des preuves.... bon, voilà, vous avez un aperçu du monde merveilleux de NeurOptimal en France.

Personnellement, j'ai assez mal vécu cette période, me demandant si je n'avais pas fait erreur. C'est le but de la manipulation de ces gens. J'ai donc contacté des chercheurs, demandé des critiques sur les groupes internationaux de Neurofeedback et aucun médecin ou scientifique n'a trouvé à redire sur mes articles. J'ai même plutôt gagné en reconnaissance dans l'histoire, au vu de la qualité de mon travail. Ces évènements expliquent ces deux mois sans article.


Valdeane
Valdeane Brown, co-créateur du NeurOptimal

Cette histoire m'a cependant apporté trois choses :

  • Bruno Warnotte, qui a traduit en français la revue de référence "Evidence-Based Practice in Biofeedback & Neurofeedback - 3rd Edition" de l'AAPB m'en a envoyé un exemplaire. J'ai commencé à le lire et déjà dans les 15 premières pages, j'ai des idées pour un article. J'en ferais la promotion dans un article et je peux même proposer de faire un achat groupé depuis le Canada pour fractionner les frais de ports, donc si ça vous intéresse, prenez contact avec moi, que je vois si cela vaut que j'y passe du temps.
  • Fred Starr, à l'origine de l'étude préliminaire sur l'augmentation des fonctions cognitives de peluche grâce à NeurOptimal, a gentiment accepté que je l'interview. J'ignore encore si cela fera l'objet d'un article ou si je sous-titrerai l'interview en français, mais ce sera encore que du bon niveau science et neurofeedback !
  • Mon article a été partagé dans un groupe anglophone et j'ai eu la chance d'avoir le co-créateur de NeurOptimal qui a participé à l'échange. C'est important pour moi, car à titre personnel, je trouve que les praticiens français travestissent les allégations originales de NeurOptimal et en voici encore une preuve. De la bouche même du créateur, NeurOptimal n'a pas été "évalué" par la FDA mais "déterminé comme un appareil de bien-être", ce qui corrobore parfaitement ce que j'écrivais dans mon précédent article et va à l'encontre de la communication française de NeurOptimal. De même, le mode de fonctionnement du NeurOptimal restera secret, ce qui rend impossible toute recherche scientifique. De toute façon, de l'avis du créateur de NeurOptimal, toute étude sur le NeurOptimal ne serait pas prise au sérieux par la communauté scientifique, donc autant ne pas en faire.... C'est un point récurrent des théories pseudo-scientifiques : trouver un biais argumentatif qui rend impossible de construire des preuves "pour" ou "contre" leur théorie.... comme ça, ils n'ont pas à prouver qu'ils ont raison puisque c'est impossible !

Bref, voilà pour la première aparté.


Courrier typique des lecteurs
Courrier typique des lecteurs

En second, par mail, deux questions qui reviennent souvent :

  • Comment se former au Neurofeedback ? J'ai vu l'Institut Neurosens, qu'en pensez-vous ?
  • Où trouver un praticien qui exerce le Neurofeedback convenablement ?

Généralement, je donne toujours la même réponse.

Sur la question de la formation, je conseille effectivement Neurosens, c'est simple : c'est les seuls à proposer la formation BCN de la BCIA en français. Vous n'avez donc pas le choix.

Sur les praticiens, la réponse n'est pas évidente car il n'y a pas de bonne réponse à l'heure actuelle. Je vous redirige sur le site de Jean-Loup (webmaster de biofeedback.fr et neurofeedback-informations.fr) qui liste les personnes ayant suivies la formation de Neurosens (qui est la partie théorique de la BCN), ici par date et ici par ville. Ces pages ont plusieurs lacunes :

  • suivre la formation de Neurosens ne signifie pas pratiquer convenablement (certains continuent de pratiquer du NeurOptimal) ;
  • suivre la formation de Neurosens ne signifie pas pratiquer (certains ne se lancent pas dans l'aventure car, ça demande du temps et de l'engagement le Neurofeedback). Ils veulent juste s'informer et j'y reviendrai.

Donc en général, je donne le lien de la liste et je conseille de contacter Neurosens par leur formulaire de contact pour avoir plus de renseignements. Je garde l'espoir qu'avec le lancement de l'Association Francophone de Biofeedback et Neurofeedback (AFBN), une liste différente, plus précise et à jour se mette en place. Mais bon, on va dire que l'AFBN manque un peu de bénévoles ces temps-ci, donc, ça prend du temps...

L'avantage de l'AFBN (qui est une association loi 1901 à but non lucratif), c'est surtout qu'une fois les premiers français certifiés BCIA, de nouvelles structures de formations pourront être lancées par ces gens et offrir la même chose que Neurosens. Du coup, l'AFBN sera à même de lister toutes cette constellation de professionnels qui émerge dans le domaine du neurofeedback, probablement de façon plus précise que Jean-Loup, car la sélection à l'entrée de l'AFBN se fait sur des critères strictes de performance clinique et scientifique.

Ce n'est guère agréable pour moi de ne pouvoir répondre à vos demandes, donc maintenant que c'est noté ici, je vais ajouter une note sur mon formulaire de contact vers cet article en vous demandant de ne plus me contacter pour ces deux sujets ! :-)

Le problème, c'est que vous conseiller Neurosens, c'est cool, mais je n'ai jamais expliqué publiquement pourquoi je conseillais Neurosens, au delà du "de toute façon, c'est les seuls". Car si c'était les seuls et qu'ils étaient mauvais, je ne les conseillerai pas. D'autant plus que je l'ai abordé avec beaucoup d'entre vous : leur marketing allume toutes les sirènes de la désinformation me concernant et ne colle absolument pas aux standards français. Donc si vous devez vous méfier du marketing de NeurOptimal, en utilisant les clefs que je vous ai donné dans mes précédents articles, vous devriez vous méfier de Neurosens, en utilisant ces mêmes clefs. C'est normal, ce n'est pas vous qui vous faites de fausses idées. Sauf que voilà, la formation de Neurosens est solide, respecte les critères de la BCIA et que les trois personnes de cet institut ont, en fait, une approche tout à fait convenable et scientifiquement rigoureuse.

Il me fallait donc un critère de comparaison.


Présentation de T. Feiner et de l'Institut de Neurofeedback-EEG (IFEN) de Munich

IFEN
IFEN

Grâce à ce blog, j'ai pu rencontrer Thomas Feiner, directeur de l'Institut de Neurofeedback-EEG de Munich (en Allemagne) qui existe depuis plus de dix ans. Thomas a eu sa certification BCN de la BCIA en 2011 (elle est valable 4 ans et doit être ensuite renouvelée -il est à jour-) et a participé comme conférencier à de nombreux congrès réputés de l'ISNR, de l'IOP et d'autres (vous me connaissez, en fait, ça m'intéresse guère).

Non, moi ce qui m'intéresse, c'est que l'IFEN collabore avec des Universités et donc des chercheurs sur des sujets divers tels que : l'EEGq, l'entrainement par Z-Score ou par ERP (d'autres formes de neurofeedback). L'IFEN a aussi développé Capito (un logiciel de test cognitif et psychophysiologique) à des fins clinique et de recherche. L'IFEN, c'est 4 employés et une vingtaine d'instructeurs supervisés par le Dr. G. Handwerker pour la branche clinique (est-il un bon médecin ? Honnêtement, peu m'importe....). L'IFEN, c'est aussi des collaboration à l'international avec des cliniciens comme Rubén Pérez Elvira (Espagne) ou Mark Smith (USA). En quoi c'est intéressant ?

Ruben a deux publications listées sur Pubmed (et un profil Google Scholar) et Mark Smith a également des publications, dont notamment cette dernière, acceptée dans un journal du groupe Nature.

De plus, l'IFEN, c'est aussi un centre de formation en Neurofeedback, comme l'est Neurosens. Comme Neurosens, est proposée la certification BCN de la BCIA, mais, selon moi, Thomas va plus loin avec sa propre certification (IFEN) qui semble plus exigeante que celle de la BCIA. Cependant, il tient à réagir sur ce point, et écrit :

I wouldn’t write we are beyond the BCIA standards. We are friends with BCIA and many of our trainers are BCIA certified as well. There a great clinicians that don't speak English and we are helping them to receive a certification through our institute, that’s all.

T. Feiner

(Traduction : Je n'écrirais pas que nous dépassons les normes de la BCIA. Nous sommes amis avec BCIA et plusieurs de nos formateurs sont également certifiés BCIA. Il y a d'excellents cliniciens qui ne parlent pas anglais et nous les aidons à obtenir une certification par l'intermédiaire de notre institut, c'est tout)

Donc, tout cela me semble très solide. C'est pourquoi j'ai voulu prendre du temps à Thomas et l'interviewer.



Les objectifs de cette entrevue sont les suivants :

  • définir le neurofeedback (et ses controverses) ;
  • revenir sur les produits qui prétendent être du Neurofeedback ;
  • expliciter les formations proposées à l'IFEN et le matériel recommandé ;
  • commenter la formation de Neurosens ;
  • discuter des coûts en Neurofeedback (pour le client comme le praticien) ;
  • ... et d'autres choses.

 En soit, vous proposer la vision d'un professionnel, qui travaille en collaboration avec des chercheurs sur l'état du Neurofeedback et de discuter de sa démocratisation en France.


Quels sont les éléments clefs du Neurofeedback ?

Avant de parler Neurofeedback, il faut définir ce mot. Si je l'utilise beaucoup, n'oublions cependant pas que le Neurofeedback n'est qu'une branche du Biofeedback, celle appliquée au cerveau. Et il existe différentes approches (mono-site, multi-sites, en se basant sur les potentiels lents, les potentiels évoqués et j'en passe) qui rentrent dans le terme "Neurofeedback".

Thomas a commencé par mettre en avant que dans le domaine, les recherches sont actives et que la technique évolue. Il rappelle d'ailleurs qu'il n'y a pas de solution universelle, de solution "taille unique" et que si l'approche utilisée est importante, la façon de la mettre en œuvre en accord avec la science et le cas particulier du client est tout aussi important.

Le Neurofeedback est avant tout une nouvelle compréhension, un nouveau paradigme, sur la façon d'aborder les pathologies. Il met en avant la corrélation entre les symptômes et l'activité électrique du cerveau, mais surtout que l'altération de cette activité électrique par Neurofeedback va très probablement induire des changements au niveau comportemental. C'est ce qu'il constate tous les jours dans sa pratique (et ce que disent les études).



Finalement, il aborde le fait que beaucoup de pathologies tirent leur origine d'une mauvaise régulation du cerveau et que ce défaut d'autorégulation peut être comblé par un apprentissage Neurofeedback.

Cependant, il faut en premier localiser la source de ce manque d'autorégulation et c'est là où intervient un élément clef : l'EEG quantitatif. C'est une réelle révolution dans le domaine, mais elle nécessite de l'expérience et des connaissances fines pour l'utiliser de la bonne façon. 

C'est pourquoi tant d'Instituts proposent du "mentorat/supervision", afin de discuter de chaque EEGq avec le praticien en formation et qu'il est conseillé de suivre régulièrement des ateliers afin de se perfectionner sur des thématiques précises.

Avoir des résultats n'est pas l'objectif final du praticien en Neurofeedback : c'est de les avoir avec le plus petit nombre de séances possible.


Quel est le parcours pour devenir praticien en Neurofeedback ? Est-ce ouvert à tout le monde ?

Une fois la pratique définie, se pose la question de la cible qui veut devenir praticien. A l'IFEN, comme à Neurosens, il y a sélection à l'entrée : seules les professions médicales ou les scientifiques sont acceptés. Car cela englobe les deux facettes du neurofeedback : l'accompagnement clinique (plutôt appris dans les professions médicales) et l'analyse des cartes cérébrales et la mise en place de protocole (qui nécessitent de lire les publications scientifiques). Les deux Instituts considèrent que le praticien devra mettre plus d'effort dans l'un ou dans l'autre, mais qu'il part dans tous les cas avec des connaissances sur lesquelles capitaliser dans sa future pratique.

Sur le parcours, j'ai été agréablement surpris de voir, qu'ici aussi, entre l'IFEN et Neurosens, c'est assez similaire : 5 jours de formation intensive pour apprendre les bases de l'EEG, des processus d'apprentissages, de l'entrainement des ondes SMR (historiquement, le premier type de Neurofeedback existant), les bases de l'évaluation neurocognitive et bien évidemment, l'EEG quantitatif (brièvement).

Ensuite, on retombe sur la même similarité : la supervision, où le praticien est guidé dans le début de son activité, par une personne plus expérimentée et certifiée BCN. Cette notion de supervision et d'aide est réellement nécessaire et utile pour le praticien. C'est un coût pour le praticien qui s'ajoute à celui de la formation, donc à prendre en compte avant de se lancer.

Se pose ensuite la question du matériel, qui lui aussi représente un coût lors du démarrage. Je sais que Neurosens, qui vient du Canada, travaille avec Thought Technology et Mitsar, alors que son côté, Thomas utilise principalement du matériel de Brainmaster. Le président de Brainmaster (Thomas Collura) est un scientifique (liste de ses publications sur Pubmed) qui a pas mal innové dans le domaine du Neurofeedback (par contre, ses partages sur Facebook, dans le groupe Brainmaster EEG, c'est aussi catastrophique que Neurosens, à croire que les gens compétents sous-estiment leur public). 

Ici, Thomas me cite leur approche par entrainement Z-Score qui est un type de neurofeedback. Très simplement, cela permet de moduler le feedback en fonction de la qualité du travail du patient, alors que bien souvent avec d'autres matériels, il n'obtient qu'un indicateur de type "bon" ou "mauvais". Cette modulation, qui apporte plus d'informations, permet de réduire le nombre et la durée nécessaires de séances de Neurofeedback.

On peut se questionner sur la pertinence des différentes approches en Neurofeedback, mais le point clef qui est commun à tous : c'est leur capacité à reproduire fidèlement le signal EEG. Et à en discuter avec des chercheurs, ce n'est pas toujours le cas, même pour des matériels certifiés par la FDA. On a notamment porté à mon attention le matériel "Evoke System" qui présentait quelques défauts à ce niveau alors même qu'il est certifié par la FDA aux Etats-Unis.


Neurofeedback : placebo ? Par EEG ou IRMf ?

IRMf
IRMf (merci Wikipedia)

Le placebo est un vaste sujet qui anime régulièrement la communauté scientifique, mais également récemment le grand public. Par exemple, sur le sujet de l'homéopathie qui n'aurait pas plus d'effet qu'un placebo (allez, ça faisait longtemps hein !). Ou sur la médecine chinoise, qui ne serait pas plus efficace que le seul placebo (là, c'est juste pour me faire de nouveaux amis). Bref, beaucoup de techniques qui font des allégations d'efficacité, oublient de tester si cette efficacité est dépendante de l'effet placebo ou de leur technique. Un peu comme le "bisous magique" de Maman qui a beaucoup d'effet.... placebo.

L'approche la plus parcimonieuse est d'accepter que le placebo intervient dans tous les traitements, je rejoins Thomas ici. C'est ce que dit la Science (et c'est pourquoi un médicament est définie par son efficacité supérieure au placebo). Mais Thomas dit que beaucoup d'enfants qui ignorent la nature de leur traitement voient leurs symptômes s'améliorer ou que des gens qui ne croient pas au Neurofeedback montrent des résultats positifs. Ici, je pense que l'on est plus dans le témoignage ou à sa frontière. Le placebo fonctionne chez les bébés ou chez les animaux. La naïveté face à un traitement n'est donc pas une bonne mesure de l'existence ou non d'efficacité spécifique. Ce qui prouve cette efficacité spécifique, c'est les études en double-aveugle et concernant le Neurofeedback, on commence à en avoir quelques unes de qualité ces dernières années.

Sur les sujets glissants, j'ai aussi voulu aborder le Neurofeedback par IRMf. Il nécessite une IRM donc est moins accessible que celui par EEG, mais permet de cibler des centres cérébraux profonds de façon plus fine que l'EEG. J'ai d'ailleurs appris récemment que mon entraineur de tir à l'arc développait des algorithmes d'analyse en temps réel pour ce type de Neurofeedback, je vais creuser le sujet. Mais assez digressé. Brièvement, Thomas explique que suffisamment d'études ont montré l'efficacité du Neurofeedback-EEG.... et, ben, je suis d'accord. Cette opposition IRMf/EEG est plus une bataille entre chercheurs qui utilisent différentes approches (la science c'est se chamailler pour apporter des preuves, hein) qu'un débat d'intérêt pour le grand public.


Le Neurofeedback "grand public"

Exemple d'électrodes sèches
Exemple d'électrodes sèches

Vous êtes beaucoup à me contacter pour avoir des informations sur les matériels de Neurofeedback "grand public" qui coûtent une poignée d'euros. Honnêtement, je ne suis pas un pro dans ce domaine, Jean-Loup est beaucoup plus compétent que moi sur le sujet (il a d'ailleurs fait cette page, très riche d'informations). En revanche, je suis en désaccord avec nombre de praticiens qui vont dire "bof, c'est de la merde".

Le point commun de ces solutions est l'utilisation d'électrodes sèches. Si c'est sec, c'est moins performant que des électrodes humides posées sur un crâne nettoyé convenablement. De ce que j'ai observé, en ayant acheté pour tester, effectivement, le signal est plus lissé, donc nous avons une perte d'information dans les hautes fréquences. En revanche, j'ai l'impression que les basses fréquences sont plutôt pas mal conservées et c'est souvent le crédo de ces solutions : sommeil, méditation, relaxation.... qui reposent sur les ondes lentes. Thomas affirme que Muse et Versus montrent un bon signal EEG (d'après les études scientifiques, je suis plutôt d'accord).

D'ailleurs à l'IFEN, il y a des ateliers de "Neuromeditation", soit en gros de la méditation assistée par neurofeedback. Cependant, il relève l'importance d'un EEGq avant. Encore une fois, rien ne doit être fait à l'aveugle et établir une carte cérébrale et un plan d'attaque spécifique est essentiel. Mais c'est une piste qu'il développe et y pensant également depuis de nombreuses années, cela me semble être tout à fait valide.

Bon, sans surprise, il ne recommande absolument pas d'utiliser ces matériels dans le cadre professionnel et encore moins sur des pathologies identifiées. Ce n'est pas médical, hein.

Concernant le médical et la solution Koala de Mensia, d'ailleurs. Ils ont ENFIN refaient leur site, suite à mon article d'avril. J'attends toujours leur publication scientifique, maintenant. Du coup, j'irai jeter à nouveau un oeil. Avec Thomas, on partage ici le même point de vue : oui, ça peut être efficace, mais ça ne sera jamais aussi bien qu'un traitement avec un praticien en cabinet. A vrai dire, je vois un réel potentiel dans Koala, donc je continue à suivre, mon opinion est plus positive que négative face à cette approche, tout va dépendre de ce qu'ils vont en faire à l'avenir et comment ils vont le marketer.


Que penser de Neurosens ?

Avant de conclure, j'ai questionné Thomas sur les pratiques de Neurosens.

Neurosens, c'est le seul Institut de formation accrédité BCIA en France, si leur site web est super bien fait (sérieusement, sans blague, c'est rare, ça mérite d'être souligné), généralement, il est soit non lu, soit mal compris. Par contraste, leur communication souffre parfois de défauts, à l'image d'Internet en général : du partage d'articles trop simplistes à mon goût.



Cependant, avoir une opinion externe, une qui n'a aucun lien avec Neurosens me semblait utile. Nous y voilà donc.

Donc, au cours de la formation, Neurosens propose d'investir dans un ProComp (deux canaux pour deux électrodes) et ils ont développé pour Biograph une solution permettant de réaliser un "mini EEGq" en déplaçant séquentiellement les électrodes sur 10 ou 19 sites. C'est une solution moins coûteuse que le Mitsar qui réalise de vrai EEGq 19-canaux, c'est pourquoi ils proposent cela pour débuter à moindre coût. Thomas note qu'une évaluation, même partielle, est de toute façon meilleure qu'aucune. Et met en évidence que ce mode opératoire donnera moins d'informations qu'un vrai EEGq. Ce qui paraît évident. Donc, l'approche n'est pas stupide pour débuter, mais cela ne remplacera jamais un vrai bilan EEGq (d'ailleurs Jean-Loup rappelle qu'il n'existe pas de certification en EEGq dispensée par la BCIA, elle renvoie vers le qEEG Certification Board).

Il a également porté à mon attention, par e-mail :

Quant à un mini EEGq avec le ProComp 2(1), il faut savoir qu'avec l'Atlantis(2) (2 ou 4 canaux) de BrainMaster + un périphérique complémentaire(3), il est possible d'utiliser un bonnet à électrodes. Donc, inutile de déplacer les électrodes, c'est le module complémentaire qui gère l'enregistrement successivement sur les différents sites : Mini-Q II.

Jean-Loup
  • (1) Le ProComp 2 coûte environ 2 500€ (le prix n'est pas public sur le site, ce que je n'ai pas manqué de critiquer par mail, oui oui) ;
  • (2) L'Atlantis coûte 2 000$ (2 canaux) ou 3 000$ (4 canaux) ;
  • (3) Le Mini-Q II coûte 1 500$. Et le bonnet 300$.
J'entends beaucoup parler de Brainmaster depuis mes articles et à force de regarder leur site, j'ai vraiment l'envie de vous faire découvrir cette boîte. Donc, je vous réserve un article dédié pour le futur.



L'entrainement mono ou bi-électrode qui est ensuite recommandé par Neurosens est appuyé par de nombreuses preuves, par exemple pour la dépression ou l'ADHD, d'après Thomas. Il relève aussi ici que c'est très bien pour débuter, mais dès que le praticien va vouloir aller plus loin, sur des pathologies plus complexes, ce ne sera pas suffisant. Jean-Loup estime que le ProComp 2 est un peu trop léger pour du NFB médical ou paramédical, en raison de son taux d'échantillonnage et de sa résolution (256Hz / 13 bits VS 4096Hz / 24 bits pour un Atlantis II), il recommande plutôt un ProComp 5, 8 ou 10 (2048Hz / 14bits) qui sera plus durable quand le praticien voudra faire du biofeedback en même temps.

En fait, ce qui est ici important à comprendre : c'est que tout le monde doit débuter. Thomas a commencé avec ce genre de système, moi aussi. C'est la pratique, l'expérience et le temps que le praticien va passer qui va le pousser à aller plus loin et à investir d'avantage dans du matériel plus efficace. Avant de courir, il faut apprendre à marcher (c'était la citation naïve, il en fallait une). Donc effectivement, à terme, le praticien s'intéressera par exemple au LORETA (Neurosens proposera d'ailleurs une formation sur cette thématique), qui offre actuellement de très bons résultats, plus rapidement.

J'ai aussi comparé les prix des formations entre l'IFEN (les tarifs sont en libre accès sur le site de l'IFEN, lien direct) et entre Neurosens, honnêtement, c'est globalement les mêmes.

Donc je pense qu'il est ici nécessaire d'avoir conscience de plusieurs points :

  • la formation de Neurosens est de qualité ;
  • ils s'impliquent fortement -et bénévolement- pour faire venir l'examen BCN de la BCIA en France et en français par l'intermédiaire de l'AFBN ;
  • la formation de 5 jours + l'achat du matériel ne sera pas les seuls coûts : vous aurez besoin de supervision (pour débuter) et de mentorat (imposé pour passer la certification BCN de la BCIA, mais vous pouvez très bien la faire à l'étranger, ce ne sera juste pas en français) ;
  • suite à cette formation, Neurosens propose des formations avancées qui vous intéresseront très vite.

Le Neurofeedback ne s'improvise pas. C'est réellement une discipline riche et passionnante, qui nécessite du temps et des fonds. Mais je crois sincèrement que le jeu en vaut la chandelle. Voir le chandelier en entier.

Cependant, je conseille vivement à tous les professionnels de santé, même ceux qui n'envisagent pas de se lancer dans le Neurofeedback, de la considérer : c'est un bon moyen de vous informer sur la technique et d'être en mesure d'en parler. Cela évitera peut-être de voir des neuropsy me sortir des conneries telles que "le neurofeedback ne tient pas dans le temps, donc je ne m'y intéresse pas".


Pour aller plus loin avec le Neurofeedback

J'ai ensuite questionné Thomas sur les techniques de neurofeedback qu'il utilise et ne sont pas couvertes dans la formation initiale. J'ai donné l'exemple du Z-Score et des potentiels évoqués (ERP).

Pendant longtemps, le neurofeedback s'est focalisé sur l'EEGq, alors que Thomas m'explique que les ERPs sont mieux acceptés par les neurologistes que l'EEGq. Il m'explique que les informations obtenues sont différentes de ceux de l'EEGq et que les potentiels évoqués sont un bon marqueur précoce de la maladie Alzheimer.

Alzheimer et ERP
Alzheimer et ERP (lien vers l'étude complète)

Thomas utilise aussi en parallèle d'autres techniques, comme la photobiomodulation transcrânienne ou la stimulation transcrânienne à courant direct. Le problème c'est leur durée d'action, les résultats ne se maintenant pas dans le temps. Il les utilise donc en combinaison avec le Neurofeedback, dont les effets persistent du fait du phénomène d'apprentissage.

Jean-Loup aborde également l'AVE (Audio-Visual Entrainment), utilisé par de nombreux praticiens du neurofeedback comme méthode complémentaire (avant les séances, pour une sorte de préparation ou de conditionnement). Avec l'Atlantis de BrainMaster, l'AVE est dirigé par l'EEG, contrairement aux systèmes AVE fonctionnant de façon autonome avec des programmes prédéfinis.

Donc pour celui qui maîtrise bien le Neurofeedback, il reste encore beaucoup à apprendre de d'autres techniques qui se focalisent aussi sur le fonctionnement cérébrale, mais avec des modes d'action et des cibles différentes.


Le Neurofeedback, une technique trop coûteuse ?

Le débat est ouvert depuis, à mon avis, l'émergence du Neurofeedback. Le Neurofeedback coûte (trop) cher, c'est connu et tout le monde en a conscience.

Ce que l'on peut apporter en temps que praticien, c'est des protocoles et des matériels qui diminuent le nombre de séance tout en conservant la même efficacité. C'est là où nous voyons un potentiel dans les entrainements par Z-Score ou par des techniques telles que les fluctuations lentes (les ondes cérébrales inférieures à 0.1 Hz) qui permettent d'obtenir de meilleurs résultats en moins de temps.

Donc c'est un sujet compliqué, qui est connu des gens qui pratiquent le Neurofeedback et la recherche est active pour diminuer cette barrière, encore trop présente.


Le conseil de Thomas aux praticiens français

Il n'y a aucune raison d'avoir peur. Je ne comprends pas pourquoi les cliniciens refusent d'en apprendre davantage sur le cerveau et d'aider leurs clients avec une approche telle que le Neurofeedback qui s'est révélé beaucoup plus efficace et qui aide déjà des milliers de clients sans aucun effet secondaire connu.

T. Feiner

Conclusion

C'est le premier "vrai" article d'entrevu avec un praticien étranger. N'hésitez pas à me donner vos retours, que je sache si vous appréciez ce format.

D'autres sont tout à fait possible, j'ai d'ailleurs quelques noms en stock, qui ont déjà acceptés de se prêter à l'exercice. Je vous laisse me confirmer que c'est utile et que ce ne serait pas une perte de temps.

Merci beaucoup à Thomas, n'hésitez pas à aller visiter son site : http://www.neurofeedback-info.de/en et son groupe Facebook : www.facebook.com/groups/1758041461107398.

Si des volontaires existent parmi vous, je pense que Thomas ne dirait pas non à trouver un francophone désireux de faire sortir la certification IFEN d'Allemagne... ;-)


R.



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